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Justice transitionnelle, processus-panacée pour une RDC affranchie et réconciliée

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Pays post-conflit à insécurité récurrente, la République démocratique du Congo doit prêcher par l’exemple en mettant en place des paradigmes nouveaux relatifs à la Justice transitionnelle en vue de rompre avec la prime à la nuisance pour l’avènement de l’Etat de droit que prône le chef de l’Etat, Félix Tshisekedi.

Les experts en la matière qui souhaitent le déclenchement de ce processus s’accrochent à la volonté politique qu’incarne le président de la République et président de l’Union africaine de venir à bout de l’impunité, manifestée lors du 43ème conseil des ministres le vendredi 7 août dernier. Ils poussent la nouvelle classe dirigeante qui n’est pas directement liée aux crimes et violations massives des droits de l’homme, à mettre en place les mécanismes y afférents en vue d’établir la résilience entre le passé d’un pays déchiré de celui à pacifier.

Dans ce contexte, les victimes des crimes graves commis en RDC aspirent à la vérité et y ont droit, les criminels doivent répondre de leurs actes, la réparation doit être de mise et les institutions de clémence doivent être mises en place à côté de la garantie de la non-répétitivité des crimes. La prise en compte de l’un des piliers au détriment de l’autre est une entorse au processus de Justice transitionnelle qui s’avère, martèle le professeur Luzolo Bambi, ”une panacée pour la construction d’un État de droit”. Le cas de la RDC est très éloquent en ce qu’elle affiche une justice transitionnelle monolithique, exhibant l’amnistie de temps à autre, faisant fi du reste, alors que la réparation des victimes ne relève que du discours.

Pourtant, au Kasaï où la crise Kamwena Nsapu a causé plusieurs dommages, les mécanismes de justice transitionnelle y appliqués ont porté du fruit au bout de deux semaines de travail intense aux côtés de la population et abouti à un édit provincial qui a porté à la création de la commission vérité et réconciliation (CVR) bâtie sur une approche participative et inclusive.

Pour une justice transitionnelle réussie

Le Bureau conjoint des Nations unies aux droits de l’homme (BCNUDH) qui donne la voix à des éminents professeurs en la matière à travers un séminaire qui se tient du 19 au 20 août, à Kinshasa, en faveur de journalistes, estime que la République démocratique du Congo doit s’imprégner des processus réussis à l’image de quelques pays du Maghreb (Tunisie, Maroc), Afrique du Sud voire le Cambodge en Asie avant d’insister sur la réparation, droit inaliénable des victimes, martèle Michèle de Aquino. Des fois ”il suffit de les rassurer que pareille situation ne se répétera plus”.

La réussite de ce processus relève de la volonté politique, l’appropriation du processus par le peuple, la neutralité des acteurs qui doivent intervenir rendue possible par la réalisation du vetting (examen de fond sur quelqu’un), des moyens et de la contextualisation.

Au regard de la complexité de la situation sécuritaire de la RDC, on ne peut envisager faire recours à la Justice transitionnelle sans évoquer l’adaptation aux réalités socioculturelles que préconise l’Union africaine pour en espérer une transformation. Celle-ci passe inévitablement par des discussions : dire la vérité, ce que rechignent à faire les parties concernées sous prétexte d’éviter d’enfoncer le couteau dans la plaie optant pour la politique d’autruche. Dissimuler la vérité s’apparente à ménager les susceptibilités laissant libre cours au mal à s’enraciner davantage.

Ce système est l’une des causes de l’échec de la commission vérité et réconciliation mise en place de 2003-2006 suite à la rébellion de 1998 avec comme mission de dire la vérité sur les crimes commis. D’après le doyen Ngoma Binda, vice-président de ladite commission, plusieurs facteurs ont précipité sa décadence. La composition pas neutre soutenue par le manque d’indépendance et de probité, le mandat très étiré pour établir les crimes et violations perpétrés depuis l’accession du pays à l’indépendance, de 1960 à 2005, et le manque des moyens ont assombri la destinée de la CVR. L’ancien vice-président de la CVR estime qu’il est judicieux pour le bien de tous de relancer la juridiction Commission vérité et réconciliation à condition de bien circonscrire le mandat cette fois-ci et d’y mettre des moyens financiers conséquents pour son fonctionnement.

A côté de ceci, la RDC peut donc s’inspirer de bonnes pratiques des pays où la CVR est une réussite tel que le Sierra Leone, Liberia, Maroc et Tunisie et ses plus proches voisins le Burundi et la République Centrafricaine (RCA). Le professeur Mutoy indique que le succès de la CVR doit être fondé sur :
-L’approche participative et inclusive : associer depuis le début toutes les parties prenantes en vue d’identifier le problème ;
-L’articulation : ne pas isoler la CVR des autres piliers de la justice transitionnelle ;
-Le mandat : circonscrire les enquêtes dans le temps
-L’amnistie : créer un système de l’impunité ; et enfin, le suivi qui consiste à mesurer l’impact du travail extrajudiciaire réalisé sur les victimes qui espèrent à la transformation. Ce dernier point est le talon d’Achille, la plupart des CVR se terminant en confusion totale.

Notons que le Secrétaire général des Nations unies définit la Justice transitionnelle comme étant ”un éventail complet des divers processus et mécanismes mis en œuvre par une société pour tenter de faire face à des exactions massives commises dans le passé, en vue d’établir les responsabilités, de rendre la justice et de permettre la réconciliation”.

Bell’amie O.

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