MediaCongo Press > BLOG > A la une > Disparition inquiétante de véhicules à Kinshasa : enquête sur un remorquage controversé (Première partie)
Depuis plusieurs semaines, un phénomène étrange inquiète les automobilistes de Kinshasa : des véhicules disparaissent sans laisser de trace. Certains sont remorqués alors qu’ils étaient simplement garés sur la chaussée, d’autres sont emportés depuis des garages situés le long des grandes artères de la capitale.
Les propriétaires, souvent désemparés, ne savent pas vers quelle autorité se tourner pour retrouver leurs engins. D’après plusieurs témoignages recueillis, ces opérations se déroulent également très tard dans la nuit, sans avertissement, sans procès-verbal, ni preuve officielle d’infraction.
Résultat : une inquiétude grandissante s’installe dans la population kinoise.
Face à cette situation, la rédaction de Mediacongo Press (MCP) a mené une enquête de terrain afin de comprendre les zones d’ombre qui entourent l’opération de remorquage des véhicules à Kinshasa.
Une opération d’assainissement devenue source de dérives
En principe, le gouverneur de la ville de Kinshasa avait lancé une opération d’assainissement des lieux publics, invitant les Kinois à retirer les véhicules abandonnés illégalement sur la voie publique, susceptibles d’entraver la circulation et de créer des embouteillages.
Cependant, sur le terrain, cette opération semble s’être éloignée de son objectif initial. Plusieurs sources indiquent que des entreprises privées de fourrières, parfois en complicité avec des agents de la Police de Circulation Routière (PCR), procèdent à des remorquages arbitraires, sans aucun mandat légal.
Pour rappel, selon la réglementation en vigueur, seule la Régie des Fourrières et de Contrôle Technique des Véhicules de Kinshasa (Rfck) — une structure relevant du gouvernement provincial — est habilitée à mener les opérations de remorquage et de gestion des véhicules saisis dans la capitale.
Des témoignages qui s’accumulent
Au micro de MediaCongo Press (MCP), un mécanicien installé dans la commune de Ngiri-Ngiri raconte sa mésaventure : « Des individus non identifiables sont venus la nuit et ont remorqué plusieurs véhicules appartenant à mes clients. Ils se trouvaient à l’intérieur de mon garage. À mon retour le lendemain matin, tout avait disparu. Jusqu’à présent, je ne sais toujours pas où ces véhicules ont été emmenés », déplore-t-il, visiblement impuissant.
Trois véhicules ont été emportés en une seule nuit sur un seul site dans la commune de Ngiri Ngiri: une Ford Explorer, une Dolce et une GMC. Ailleurs, d’autres véhicules ont également été remorqués à Ngiri Ngiri et à Kasavubu, notamment une Hyundai X35 et trois Ford Transit. Tous ces véhicules restent introuvables, que ce soit au camp Lufungula, à l’Échangeur de Limete ou dans tout autre site officiel de la police.
Comme lui, plusieurs propriétaires de véhicules affirment avoir subi des pertes similaires, sans qu’aucune procédure claire ne leur soit expliquée. Certains soupçonnent même un réseau informel opérant sous couvert d’une mission publique.
Aucun renseignement n’est fourni sur la destination de ces véhicules remorqués à des heures tardives de la nuit. Certaines autorités policières contactées dénoncent une pratique arbitraire, rappelant que de telles opérations ne peuvent normalement se dérouler en dehors des heures de service. Mais qui donne les ordres ? Qui se cache derrière ces opérations qui font des centaines de victimes chaque semaine à Kinshasa ?
Un incident qui a secoué l’opinion
La tension a atteint un point critique le 9 octobre dernier, dans la commune de Kasa-Vubu, lorsqu’une altercation a éclaté entre un mécanicien et un agent de la PCR au sujet d’une opération de remorquage jugée irrégulière.
L’incident, filmé et relayé sur les réseaux sociaux, a provoqué l’indignation de l’opinion publique, révélant au grand jour les pratiques douteuses de certaines équipes de terrain.
La réaction ferme de la Rfck
Face à cette situation, le Directeur général de la Rfck, M. Joseph Kasinzi Mafolo, a réagi le lendemain, le 10 octobre, par un communiqué officiel.
Il y ordonne la fermeture immédiate et sans condition de toutes les fourrières privées opérant illégalement dans la capitale.
« La Régie des Fourrières et de Contrôle Technique des Véhicules de Kinshasa (Rfck) rappelle à l’opinion publique qu’elle est la seule structure officielle, légalement habilitée à organiser, gérer et superviser toutes les activités liées aux fourrières dans la ville de Kinshasa. Elle invite la population à demeurer vigilante et à signaler tout abus ou activité suspecte auprès des autorités compétentes », précise le communiqué.
Un besoin urgent de réorganisation
L’opération de remorquage, qui devait initialement contribuer à assainir la ville, risque de se transformer en une source d’abus si elle n’est pas encadrée avec rigueur.
La population appelle de ses vœux une clarification urgente du rôle de chaque acteur — entre la police, la RFCK et les entreprises privées — afin que cette mission de service public ne devienne pas un terrain d’enrichissement illicite et d’injustice.
Dossier à suivre…
Daniel Aloterembi
MediaCongo Press
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