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La corruption freine l’élan du développement de l’Afrique

À l’occasion de la Journée Africaine de lutte contre la corruption célébrée cette année sur le thème : « Stratégies et mécanismes pour la gestion transparente des fonds Covid-19 », 28 sections de Transparency International de l’Afrique ont envoyé une lettre ouverte aux dirigeants de l’Union africaine (UA), en leur rappelant leurs engagements en matière de lutte contre la corruption et en demandant instamment que des mesures supplémentaires soient prises d’urgence.

Ces organisations ont fait part de leur inquiétude face au relèvement de la région après la pandémie de COVID-19, qui a gravement affecté les moyens de subsistance de tous les citoyens africains et aggravé les inégalités. De fonds importants sont nécessaires pour inverser ces effets, mais la corruption menace de détourner de l’argent de domaines importants tels que les soins de santé et l’alimentation.

Dans un communiqué de presse parvenu à la rédaction de Media Congo Press, ces 28 organisations appellent les États à ouvrir les informations sur les achats, à sanctionner et à poursuivre tout abus des fonds de relance Covid-19. La lettre reconnaît également que des dizaines de milliards de dollars, en fonds illicites, quittent l’Afrique chaque année. Pourtant, c’est de l’argent qui pourrait être investi dans des services publics essentiels pour les populations.

La lettre de Transparency International appelle les dirigeants à accélérer les stratégies de lutte contre ces flux financiers illicites et à déployer des réformes telles que les exigences de « connaître sa clientèle » et la fin des structures de compagnies secrètes. Bien que la ratification quasi universelle par les États africains de la Convention de l’UA sur la prévention et la lutte contre la corruption soit louable, la lettre attire l’attention sur la piètre traduction de cette convention en actions au niveau national.

Les 28 sections de Transparency International ont saisi l’occasion pour féliciter l’Union Africaine d’avoir choisi et marqué le 11 juillet comme Journée africaine de la lutte contre la corruption et saluent les trois États membres qui ont récemment ratifié la Convention de l’Union Africaine sur la prévention et la lutte contre la corruption (Cuaplc), qui rejoignent les 44 autres qui l’avaient déjà ratifiée. Elles invitent les huit autres États restant, à prendre des mesures pour ratifier et domestiquer cette importante Convention et élaborer des plans d’actions clairs pour sa mise en œuvre à la première occasion.

Corruption : menace pour la vie et obstacle dans la réalisation de l’Agenda 2063 et des ODD

Par ailleurs, les 28 sections de Transparency International notent avec une grande préoccupation que la corruption est, et reste une menace importante pour la vie, la jouissance des droits de l’homme, la démocratie et les institutions démocratiques et constitue un obstacle important pour les États africains, dans la réalisation de l’Agenda 2063 et des Objectifs de développement durable (ODD).

Elles soulignent en outre que, les conséquences de la corruption sur la gestion de la pandémie de Covid-19, y compris les ressources, les vaccins et le personnel nécessaires, est visible et ne peut être ignoré, compte tenu de son impact sur les plus vulnérables, les pauvres et les personnes marginalisées.

Elles décident de se joindre à l’UA pour appeler à des réformes de l’architecture financière mondiale et reconnaître ainsi la création du Sous-Comité sur les questions fiscales et les flux financiers illicites (FFI), dans le but de renforcer la mobilisation des ressources et de réduire les pertes, le gaspillage sur le continent, la dépendance vis-à-vis des prêts abusifs externes qui ont alourdi le fardeau de la dette sur le continent.

Elles invitent également l’UA, à accélérer l’achèvement, le déploiement et la mise en œuvre de la stratégie sur les questions fiscales et les FFI. La stratégie en cours d’élaboration positionnera efficacement le continent, pour initier des réformes mondiales sur une convention fiscale inclusive et augmenter les ressources disponibles dans une ère post-pandémie.

Les sections de Transparency international appellent les États membres de l’UA à renforcer les règles de « Connaissance clientèle », afin de veiller à ce que les facilitateurs de la corruption et des flux financiers illicites, y compris les facilitateurs professionnels tels que les banquiers, les avocats et les comptables, soient tenus responsables des actions qui facilitent la perte de ressources.

Elles exigent aux soumissionnaires, pour les marchés publics, de se soumettre à des procédures de diligence raisonnable (…) et exhortent les états africains à lutter contre la corruption dans la fourniture de services de base, en particulier le logement, l’eau, l’assainissement, l’éducation, la santé, les réponses aux crises humanitaires et les systèmes judiciaires.

« La corruption dans la fourniture de services de base a tendance à toucher principalement les citoyens les plus pauvres qui dépendent de ces services publics et désavantage les personnes vivant avec handicap, les femmes et les enfants en particulier. De même, la corruption dans l’administration foncière exacerbe les inégalités en violant les droits fondamentaux des communautés locales, en particulier des groupes vulnérables (…) », peut-on encore lire dans la lettre ouverte des 28 sections de de Transparency International.

Pour sa part, le vice-président de l’ONG internationale, Rueben Lifuka, averti que : « C’est un moment critique pour la région d’Afrique et ses habitants. Si la corruption n’est pas combattue de toute urgence, elle bloquera les efforts de reconstruction après la pandémie dévastatrice et entravera les plans de la région visant à bâtir un avenir plus fort et durable ».

Et de poursuivre : « La gestion équitable et transparente des fonds de relance à grande échelle liés à la COVID-19 et la prévention de la sortie illicite de milliards de dollars de la région, devraient être la priorité absolue de tous les dirigeants. En cette Journée Africaine de lutte contre la corruption, nous avons besoin que l’UA et les gouvernements des États africains suivent les conseils d’experts et instituent de toute urgence des réformes anticorruptions globales, fortes et décisives. »

Le dernier Indice de Perception de la Corruption montre que la corruption dans le secteur public en Afrique se situe à une moyenne de 33 sur 100, soit le score régional le plus bas au monde. En outre, plus d’une personne sur quatre en Afrique a versé un pot-de-vin pour accéder aux services publics, selon l’enquête la plus importante et la plus détaillée sur les expériences directes des citoyens en matière de corruption, le Baromètre mondial de la corruption.

José Wakadila

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