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C’est sur un appel à l’unité nationale et à la conscience collective que l’Église du Christ au Congo (ECC) a centré son message de ce jeudi 30 juin, à l’occasion du 62ᵉ anniversaire de l’accession à l’indépendance de la République Démocratique du Congo. Cette confession religieuse invite, autant la classe politique que l’ensemble du peuple Congolais, à adopter une nouvelle approche plus collective de la gestion du pays dans laquelle elle estime que chaque partie à sa partition à jouer pour l’émergence d’un Congo voulu « libre, uni, fort et prospère ».

L’Église du Christ au Congo émet les vœux de voir la nation congolaise toute entière marcher ensemble sur les traces de Patrice-Emery Lumumba. Elle estime que la classe politique congolaise devrait devenir plus mature en s’inscrivant dans la logique d’une administration collective au service du bien de la communauté, plutôt que de continuer à servir des intérêts personnels.

L’ECC appelle la population congolaise au sens de responsabilité et à ne pas se dédouaner de son implication en tant que sonnette d’alarme, notamment par des appels au patriotisme et à l’unité nationale. Aussi, elle rappelle le rôle majeur de l’Église en tant que garant de la spiritualité, car la RDC a une vocation prophétique qui n’est plus à démontrer

Ci-dessous le Communiqué :

LETTRE PASTORALE DU Rév. Dr André-Gédéon BOKUNDOA-BO-LIKABE, PRÉSIDENT NATIONAL DE L’ECC À L’OCCASION DE 62 ANS DE L’INDEPENDANCE DE LA REPUBLIQUE DEMOCRATIQUE DU CONGO.

« LEVES-TOI ET PRENDS COURAGE, CAR C’EST TOI QUI FERAS ENTRER CE PEUPLE DANS LA TERRE PROMISE » (JOSUE 1, 2).

Peuple de Dieu, bien-aimés dans le Seigneur, Chers frères et sœurs ;

Que la Grâce et la Paix vous soient accordées de la part de Dieu notre Père et de Jésus-Christ notre Seigneur et Sauveur.

Le 30 juin 1960 se manifestait l’espoir d’un tournant décisif de l’histoire de la République Démocratique du Congo marqué par le passage de la colonisation à la liberté, des violations des droits de l’homme au respect de la vie et de la dignité humaine, de la confiscation de la souveraineté populaire à l’ouverture de la démocratie, de l’exploitation illicite des ressources naturelles à la reconnaissance des droits des sols et du sous-sol de l’Etat congolais, bref de l’état colonial Belge à la République Démocratique du Congo.

Les fils et filles du Congo ont vu en cette date le symbole de la solidification du mythe fondateur de l’existence de notre nation et du début de notre autodétermination en tant que peuple dans le concert des nations.

Le mérite de cette victoire était incarné par nos héros nationaux, en l’occurrence, Patrice Emery LUMUMBA qui, par une vision claire sur le destin prophétique du Congo et un courage patriotique sans mesure pour le combat du devenir commun, a payé le sacrifice suprême en vue de léguer à notre chère patrie un héritage générationnel.

Peuple de Dieu, bien-aimés dans le Seigneur ;

62 ans après l’accession à l’indépendance, faut-il enterrer Patrice Emery LUMUMBA ou le ressusciter dans la mémoire collective? Faut-il pleurer l’échec de son combat ou mobiliser le peuple à l’éveil de conscience collective ?

La Bible dit en Josué 1, 2 : « Moïse, mon serviteur, est mort ; maintenant, lève-toi, passe ce Jourdain, toi et tout ce peuple, pour entrer dans le pays que je donne aux enfants d’Israël ».

L’appel de Dieu à Josué nous enseigne sur la capacité qu’a le Seigneur de finir une initiative qu’il a commencée en dépit de diverses difficultés. Mais aussi et surtout il montre la responsabilité qu’a une génération qui succède à une autre.

Israël a voulu faire un deuil perpétuel sur la mort de Moïse pensant que celle-ci était la finalité de tout un rêve collectif. Personne ne croyait qu’en l’absence de Moïse un autre serviteur de Dieu se lèverait pour reprendre le flambeau en vue de conduire le peuple vers son destin prophétique. D’où la question cruciale pour Israël devrait être celle de savoir que faire pour poursuivre la vision de Moïse et non comment pleurer Moïse ?

Cette même question nous est posée dans le contexte de notre histoire. Qu’avons-nous fait pour pérenniser l’héritage de Patrice Emery LUMUMBA sur la vision d’un Congo libre, uni, fort et prospère ?

Au moment où notre pays qui, après avoir vécu les atrocités du phénomène « mains coupées pour le caoutchouc », vit aujourd’hui les phénomènes des crimes contre l’humanité commis sur de paisibles populations civiles et viols massifs sur les femmes et enfants, des agressions par des armées et des groupes rebelles et terroristes durant plus de deux décennies causant près de 10 000 000 de morts.

Dans le même registre, nous continuons à déplorer les exploitations illicites de nos ressources naturelles, la confiscation de la souveraineté populaire par des arrangements politiques impactant la gouvernance publique, l’indépendance de la Justice, la crédibilité des processus électoraux, ainsi que l’absence des politiques d’émergence de la vie socio-économique du peuple. Ce qui nous pousse à nous questionner le sens de la célébration de notre indépendance à ce jour.

Peuple de Dieu, bien-aimés dans le Seigneur ;

Où est passée l’élite intellectuelle du Pays ? Quelle conscience anime les leaders politiques et sociopolitiques de notre Pays à ce jour ? Quelle est la qualité de la mission qu’accomplissent les religieux de ce pays ? Quel type d’engagement citoyen et patriotique détermine notre jeunesse actuelle ? Quel type de formation donnons-nous à nos enfants pour la relève du pays ? Avec quelle qualité de processus électoral veut-on légitimer les institutions et construire l’unité nationale ?

Souvenons-nous que dans Matthieu 11, 21-22, Jésus, reprochant les villes de Chorazin et Bethsaïda, a dit : « Malheur à toi, Chorazin ! Malheur à toi, Bethsaïda ! Car, si les miracles qui ont été faits au milieu de vous avaient été faits dans Tyr et dans Sidon, il y a longtemps qu’elles se seraient repenties, en prenant le sac et la cendre. C’est pourquoi je vous le dis : au jour du jugement, Tyr et Sidon seront traitées moins rigoureusement que vous ».

Comme pour dire que si les sonnettes d’alarme, les appels au patriotisme et à l’unité nationale, les avertissements de l’Eglise avaient été lancés à nos pères de l’indépendance, ils se seraient unis et auraient privilégié l’intérêt supérieur de la Nation. C’est pourquoi je vous dis : notre jugement sera plus sévère que celui de nos précurseurs.

Peuple de Dieu, bien-aimés dans le Seigneur ;

Nous ne pouvons sortir notre pays de cette crise multiforme que grâce à la conscience collective et à l’unité nationale. C’est pourquoi la Bible montre en 1 Corinthiens 12,12-31 l’exigence de l’unité dans la construction d’une société forte et prospère par la reconnaissance des mérites ainsi que le respect du rôle des uns et des autres.

C’est ici l’occasion pour nous, Église du Christ au Congo, de lancer encore une fois l’appel à l’unité nationale et à la conscience collective des fils et filles de la République Démocratique du Congo.

62 ans après l’indépendance, il est temps que la classe politique congolaise quitte la vieille conception du pouvoir comme privilège individuel ou d’un groupe d’individus pour enfin devenir de véritables serviteurs valables de l’Etat.

Il importe de rappeler que la force morale et politique de Patrice Émery LUMUMBA et ses compagnons reposait sur la cohérence entre la parole et l’action.

C’est aussi l’occasion de demander au peuple congolais de faire preuve de maturité en devenant exigeant vis-à-vis de la classe dirigeante de notre pays. Exigeant par rapport aux traités et accords que l’on signe en notre nom, des lois que l’on produit pour la marche de notre pays, le niveau de l’indépendance de notre Justice, le niveau du respect de leur responsabilité à nous protéger et l’orientation que l’on donne au processus électoral.

Au regard de ce tableau sombre et très préoccupant pour l’avenir de notre pays, l’Eglise du Christ au Congo adresse ses prières à l’Eternel, le Berger de cette nation pour qu’Il parle au cœur de chacun d’entre nous.

Que l’Eternel bénisse la République Démocratique du Congo.

Bonne fête de l’indépendance.

Je vous remercie !

Fait à Kinshasa, le 30 Juin 2022

 

Rév. Dr André-Gédéon BOKUNDOA-BO-LIKABE

Djodjo Vondi 

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