Le procès de Constant Mutamba, opposant politique poursuivi notamment pour corruption et détournement de fonds publics, a servi ce lundi de caisse de résonance à un problème systémique : la gestion opaque des marchés publics en République démocratique du Congo.
Appelé à témoigner devant la Haute Cour, Christian Kalume, expert à l’Autorité de régulation des marchés publics (ARMP), a livré un constat accablant sur les pratiques en vigueur dans l’attribution des contrats publics.
« Beaucoup de contrats sont signés sans que nos services en soient informés. Dans la majorité des cas, nous ne les découvrons que lorsqu’un scandale éclate », a-t-il affirmé à la barre.
Selon lui, la procédure normale de passation par appel d’offres, censée garantir la concurrence et la transparence, est largement contournée au profit des marchés de gré à gré, souvent conclus dans l’opacité.
« La RDC attribue bien plus de marchés de gré à gré que par appel d’offres, alors que la règle, c’est l’appel d’offres », a-t-il insisté.
Ces révélations confortent les critiques récurrentes des ONG spécialisées dans la lutte contre la corruption, ainsi que celles des partenaires internationaux, qui dénoncent un système de commande publique capturé, sans contrôle ni reddition de comptes.
Le témoignage de l’expert a également mis en lumière les limites d’action de l’ARMP elle-même, pourtant chargée de veiller à la régularité des marchés publics.
« Je ne peux pas affirmer que tel ou tel contrat est invalide. Beaucoup de marchés sont signés, exécutés et même payés sans que nous en ayons connaissance », a-t-il déploré.
Dans un pays où les marchés publics constituent un pilier de l’économie nationale, cette opacité chronique fragilise les réformes engagées et nourrit la méfiance croissante de la population à l’égard des institutions.
Alors que le procès Mutamba se poursuit, le témoignage de l’ARMP un débat plus large que le seul sort de l’accusé. Il met en lumière un dysfonctionnement structurel profond, dont la résolution exige une volonté politique ferme et une refonte de la gouvernance publique.
Djodjo Vondi