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Kinshasa : campagne électorale par-ci, commerce de charme par-là, les enchanteurs gagnent coup sur coût !

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Kinshasa dit Kin la belle, est une ville cosmopolite et capitale d’un pays aux dimensions continentales considéré scandale géologique, tant ses ressources naturelles et minières sont importantes et diverses, ses forêts poumons du monde et ses innombrables cours d’eau et ressources halieutiques ainsi que ses terres arables. En elle-même, elle attire nombreux investisseurs, chinois comme turcs qui s’acharnent sur des contrats immobiliers comme d’amodiation, le tout sur une population vivant en-dessous du seuil de pauvreté. Un pan révélateur de la réalité sur les acrobaties quotidiennes de survie de ses habitants, chacun se mouille du mieux qu’il peut. Dans cet environnement regorgeant d’une population estimée à plus de dix millions et qui n’octroie que des opportunités à une poignée d’âmes dites bien nées, le plus grand nombre règne en prédateurs et les plus forts dominent. Les hommes comme les femmes sont prêts à tout !

En cette période de campagne électorale, il n’y a pas que de candidats en lice pour les scrutins du 20 décembre. Cette saison est une brèche pour ceux qui veulent s’attirer les faveurs des politiciens en espérant un poste ou une proximité de n’importe quelle nature, “l’essentiel c’est d’être là”, soutiennent certains, peu importe le prix à payer. Pour cela, il faut déjà appartenir à un groupe ou parti politique, bien évidemment…

Adhérer à un parti ou regroupement politique, schéma classique

Si à Beni, ville du Nord-Kivu dans la partie Est du pays, ce sont les candidats qui emballent les jeunes par des promesses dans le but d’obtenir leur aide pour battre campagne, à Kinshasa c’est tout l’inverse. Les partis politiques enregistrent de nouveaux adhérents depuis un temps pour “soutenir la vision du président du parti”, fait-on croire au début de l’histoire. Au fur et à mesure que les jours passent, les intentions évoluent. Soutenir la vision du président du parti se décline en slogan, toutes veulent se faire remarquer par ce mâle dominant, le porteur de vision, le leadership incarné, le président du parti.

Oui, j’ai bien dit “toutes”; puisqu’il s’agit bien des jeunes demoiselles dont la tranche d’âge varie entre 20 et 25, voluptueuses, toutes belles les unes que les autres et aussi fraîches assorties d’un brin d’innocence. En réalité, des véritables prédatrices, qui ne pensent qu’avoir leur charme à offrir pour “maximiser leurs recettes”. Comme si leurs corps généreux ne suffisaient pas, elles vont jusqu’à sceller des pactes avec le monde enchanté pour captiver celui qui leur inspire désir. Elles monnayent leurs charmes pourvu qu’elles atteignent leur but, témoigne “Mwalimu” enseignant ou maître en langue swahili, ndlr. C’est lui l’homme qui leur porte chance, leur génie, l’homme qui réalise leurs rêves.

Les enchanteurs affairistes gagnent coup sur coût !

Je suis à la commune dite “Paris” aux encablures de la banque du sang non loin d’une des meilleures écoles de ce coin. Sous des flamboyants et arbres qui libèrent fraîcheur en cette période de grosse chaleur, au-delà de 30°, s’allongent des terrasses, buvettes : chaises et tables exposées au dehors pour faire profiter aux clients de la température agréable que dégagent leurs innombrables feuilles, verre d’une bonne fraîche en main, et aux habitués “enfants du coin”, cela va de soi, un lieu de commérages de tous genres allant du nouveau copain de la fille de la voisine d’à peine vingt ans, roulant gros cylindré et qui irait plutôt mieux avec sa mère… aux candidats radins ! Tout se dit et se sait là. En ce lieu sans foi ni loi, tous se confondent, jeunes et vieux se côtoient comme des vieux potes du collège, sans égard aucun.

Au même moment, défilent des jeunes filles de toutes sortes, libre cours à votre imagination… j’observe à une distance d’au moins trois mètres de ma position un jeune homme à la trentaine révolue avec un air de sage, dira-t-on, qui les reçoit à tour de rôle. Cette scène qui, tout à coup, confère une allure de sanctuaire à notre beau cadre, m’intrigue. Ma curiosité tapie dans mon âme de chevalier de la plume bridée, tressaillit. Du coup, je me renseigne sur cette activité qui défie l’ordinaire. “Eh, frangin, qu’est-ce qui se passe là-bas ?”, “Shut”, me rétorque-t-il les sourcils froncés, “attend un peu”. Bonne ou mauvaise nouvelle, il n’a pas fallu longtemps pour qu’il prenne sa pause que mes yeux se sont écarquillés, mes oreilles n’en revenaient pas de ce qu’elles entendaient… “Ah ces jeunes filles vont me tuer… mais je gagne à tous les coups”, le dit-il, en ricanant, à son interlocuteur avec qui il semble d’ailleurs très familier. “Elles sont venues avant le lancement de la campagne pour que je leur fasse ‘des travaux’ [rituels pour porter chance, ou autres atouts selon le besoin, ndlr]. Maintenant qu’elles ont intégré leurs différents partis, elles veulent plus, elles veulent conquérir le boss… mais là ça demande plus tu le sais non…” se réjouit Mwalimu. Par plus, il veut dire que ça requiert des “travaux” qui ne valent pas de l’argent cette fois… chacune, autant qu’elles sont, devront entretenir des relations sexuelles avec lui… quel fut mon choc après ces mots ! Et c’est le prix à payer pour celles qui veulent plus que briller… non, je dirai, se faire remarquer dans le parti ou regroupement. Bref, Mwalimu, charlatan comme le penseraient d’aucuns, une chose est vraie, il se réjouit de son coût et jouit de ses coups. Chacun entreprend comme il le peut pour nourrir son homme, lui, il assure son pari, mêlant affaire et plaisir, c’est du showbiz, tout dépend du contexte.

Des efforts foulés aux pieds !

Souvenons-nous qu’à chaque moment de l’histoire kinoise, un phénomène qui relève des mœurs émerge et rafle l’actualité. Du temps où nous grandissions, les chanteurs portaient le fardeau de dénoncer certains dérapages. Mais actuellement, la chandelle revient aux réseaux sociaux qui s’en chargent avec le risque gros de donner lieu à des frasques et revers de tous bords. Et face à l’avènement d’une nouvelle classe des femmes “combattantes, battantes, fortes”, source d’inspiration des jeunes filles balayée un matin par le scandale “Porta potty”, quel fut l’effarement chez toute une génération des jeunes adolescentes sombrées dans la désillusion totale… Enfin, des années 90 à ce jour, nous avons enregistré les développements de plusieurs courants des filles entre 15 et 20 ans pour celles s’accrochant à leur adolescence, qui n’en avaient qu’après leur sensualité : nous sommes passés de “tika muana [halte à la pédophilie], mabata rouge [canes rouges], sans calebars [sans caleçons], sans soutiens, pesa elengi [les savoureuses]” et que sais-je encore…

Ces appellations qui remettent en question les efforts conjugués pour renverser les stéréotypes ou clichés dégradants sur la condition de la femme, égrènent et réduisent ainsi à néant le travail des organisations féminines comme internationales qui militent avec acharnement pour la valorisation du statut de celle-ci. En même temps, les efforts de toute une législature pour la consécration de la parité dans la Constitution foulés au pied !

Dans cette société où la femme doit fournir un double effort pour s’imposer, ressaisis-toi ; tu n’es pas que femme, tu as plus offrir. Sans flirter avec l’hypocrisie, comprend ceci : quand un homme te regarde, il voit ta condition, pour lui, tu es une femme, tu es une fille… tu dois lui montrer autre chose, qu’au-delà de ta condition, tu peux faire plus, tu as une connaissance à partager, une expertise à faire valoir. Et retiens ceci, ce n’est pas un homme qui te tiendra par la main pour promouvoir ce qui t’est garanti par la Constitution. Tu as commencé là, mais tu n’es pas obligée d’en rester ou d’en finir là, tu peux faire mieux. Alors lève-toi, bats-toi, et forme-toi, l’avenir reste prometteur !

Plum’Belle

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