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Lithium : la voix « discordante » de Global Witness

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Dans son dernier rapport publié il y a quelques jours, cette ONG américaine s’inquiétait de la ruée vers ce minerai en Afrique, particulièrement en République démocratique du Congo. Dans un contexte de mobilisation mondiale pour garantir une transition énergétique, avec le lithium comme métal stratégique pour développer les nouvelles technologies liées aux énergies renouvelables, la voix discordante de Global Witness continue à susciter de vives réactions. Selon l’ONG américaine, la population ne tirerait que peu de bénéfices de l’incroyable richesse minérale du pays.

En chiffres, l’extraction minière dans son ensemble, bien qu’étant un secteur intensif en capital, ne génère que plusieurs dizaines de milliers d’emplois formels, représentant environ 0,1 % de la population active congolaise. Des secteurs moins contrôlés, comme l’exploitation artisanale par exemple, font vivre directement et indirectement des millions de personnes. Dans cet effort d’évaluer les engagements sociaux des entreprises minières, l’ITIE est également l’une des organisations internationales à s’y intéresser, à travers la publication d’un rapport visant à prendre la mesure exacte de l’impact de l’exploitation minière sur les communautés locales.

À en croire un expert minier (sous couvert de l’anonymat), le débat engagé par Global Witness est très profond. « Il est question de savoir si les dirigeants africains sont suffisamment matures pour faire profiter leurs populations respectives de cette nouvelle manne qu’est le lithium ». Selon lui, toute tentative de politiser le rapport de Global Witness ne serait qu’un « raccourci » pour éviter le vrai débat : « Comment l’Afrique se prépare-t-elle dans l’encadrement de ce précieux minerai convoité mondialement ? Quelle est sa politique ? Quelle est sa vision ? En RDC, allons-nous continuer à extraire le minerai sans le transformer en produits à plus forte valeur ajoutée, en violation de la loi d’ailleurs ? ». Une mutualisation des moyens alloués par les miniers pour développer les filières scolaires et académiques en adéquation avec les besoins exprimés sur le terrain, pourrait-il promouvoir une nouvelle industrie issue du lithium, poursuit-il.

Loin des influences politiques et politiciennes, le vrai débat est d’autant crucial que le rapport table en fait sur trois mines de lithium émergentes au Zimbabwe, en Namibie et en RDC. « Ce que nous avons découvert montre que la ruée vers le lithium sur le continent – loin de garantir une transition énergétique juste – risque d’alimenter la corruption et toute une série d’autres problèmes environnementaux, sociaux et de gouvernance », notent les rédacteurs. Par ailleurs, les détournements se succèdent sans une réelle volonté de recadrer la situation.

Si l’Australie, le Chili et la Chine ont représenté plus de 90 % des 130 000 tonnes produites en 2022, la demande de lithium devrait être multipliée par six au cours des treize prochaines années. Dans ce nouveau contexte, plusieurs projets africains devront théoriquement entrer en jeu, notamment au Congo démocratique. « À ce stade, tous les projets en Afrique sont dans une phase d’exploration ou de développement », renchérit l’expert. L’enjeu est très élevé pour la RDC. En 2021, martèle-t-il, le pays a fourni 74 % du cobalt mondial (Source : Cobalt Institute). « Nous continuerons à jouer un rôle de premier plan avec nos grandes réserves en cobalt et lithium ».

Pour rappel, un gisement de lithium a été découvert à Manono, dans la riche province du Tanganyika, avec près de 400 millions de tonnes de minerai à 1,6 %, soit 6 millions de tonnes de lithium.

Laurent Ifayemba 

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